La FEDELIMA, fédération des lieux de musiques actuelles, tient à saluer le travail du sénateur Julien Bargeton qui, dans son rapport remis le 20 avril 2023 à la ministre de la Culture, rend plusieurs préconisations et premières pistes de réflexion auxquelles nous souscrivons pleinement.
La proposition, en particulier, de création d’une contribution financière des acteurs de la musique enregistrée est nécessaire et justifiée. De même, la proposition de l’extension de la taxe sur les spectacles à l’ensemble du champ musical, permettant de mettre les acteurs sur un pied d’égalité, traduit ainsi notre responsabilité commune dans le financement de la filière. Nous relevons également la proposition de baisser le mécanisme de droit de tirage et l’attention portée aux contrats de filières en régions. Ces quatre propositions permettent de renforcer le financement de projets d’intérêt général. Enfin, nous soutenons la proposition de consolider la mission d’observation de la filière musicale.
Toutefois, au regard de la lettre de mission fixée par la Première ministre qui a confié au sénateur Julien Bargeton une mission « de réflexion sur le financement des politiques publiques en direction de la filière musicale », nous souhaitons apporter de la nuance à cet enthousiasme.
La FEDELIMA, dont les membres se revendiquent de l’économie sociale et solidaire*, constate que le rapport se concentre principalement sur le financement de l’établissement public du « Centre national de la musique » et sur la partie marchande de la filière musicale, laissant ainsi planer le doute quant à la mise en place d’une stratégie globale et ambitieuse pour la filière musicale française, qu’il est pourtant aujourd’hui important de sécuriser face à l’industrialisation galopante et au phénomène de concentration qui est à l’œuvre.
Si le sénateur Julien Bargeton note, dans sa conclusion, que sa mission ne consistait pas à « traiter la place durable de la musique en France (...) qui ne peut se passer d’une réflexion approfondie sur l’éducation artistique, de la musique à l’école à la formation dans les conservatoires en passant par les pratiques amateurs », nous regrettons qu’une réflexion plus approfondie n’ait pas été menée sur le financement de la filière musicale dans son intégralité, incluant, en particulier, l’articulation de l’ambition politique et des financements pour la filière musicale entre le Centre national de la musique, le ministère de la Culture et les collectivités territoriales. Le Centre national de la musique ne saurait être le seul outil d’une nouvelle ambition pour la filière musicale en France.
Nous regrettons enfin que le rapport n’aborde pas le financement de la filière à l’aune des enjeux de société : la transition écologique, la nécessité de créer, produire et diffuser mieux, de permettre une accessibilité de toutes et tous à la musique, la nécessité de favoriser l’inclusion, la diversité, le vivre ensemble. Nous défendons l’idée d’une filière vertueuse, capable de sécuriser les acteurs actuels et les parcours professionnels, d’accompagner les créations artistiques, qu’elles soient professionnelles ou en amateur, destinées à une large audience ou à un public confidentiel. Nous défendons l’idée d’une filière éthique, où l’on favorise le bien-être au travail et une vision positive de nos métiers, tout en permettant le renouvellement des pratiques artistiques, l’émergence de nouvelles formes et l’existence d’une réelle diversité artistique pour les publics et les musicien·ne·s.
La FEDELIMA reste attentive à la traduction politique de ce rapport et se tient prête à poursuivre des échanges constructifs et fructueux concernant la stratégie de financement de la filière musicale en France.
* La FEDELIMA défend l’existence d’initiatives citoyennes et non lucratives, différenciées des institutions publiques, dans les multiples dimensions des espaces urbains, périurbains et ruraux. À côté de projets portés par une finalité essentiellement lucrative, des projets artistiques et culturels – et notamment musicaux - ont intérêt à se développer sur tous les territoires et en harmonie avec leurs habitants. Il en va de la dynamique sociétale et d’un vouloir vivre ensemble dépassant largement la seule rentabilité économique. Développant leur projet dans le cadre d’une économie plurielle, les adhérents de la FEDELIMA s’accordent ainsi sur la primauté de l’humain sur le marchand, une orientation explicite au service de l’intérêt général, l’utilité sociale et un ancrage territorial fort.